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Quelle aide peut attendre une victime de violences conjugales ? Aide financière d'urgence et état des lieux

La loi n° 2023-140, promulguée le 28 février 2023, instaure une aide universelle d'urgence pour les victimes de violences conjugales. Publiée au Journal Officiel le 1er mars 2023, elle découle de la proposition de loi n° 875 présentée par des sénateurs.

Cet article en synthétise les points importants, et vous propose en dernière partie une liste des autres aides disponibles par ailleurs pour les victimes de violences conjugales en France, qu'elles soient financières ou pas. N'hésitez pas à solliciter mes conseils d'avocate en violences conjugales si vous désirez des précisions.

Concernant cette aide financière d'urgence applicable au plus tard en décembre 2023 :


Contexte : Les sénateurs ont souligné l'importance de l'autonomie financière pour les victimes afin d'éviter leur retour au domicile familial. La proposition s'est donc basée sur une expérimentation menée à Valenciennes, où un dispositif d'accompagnement global est mis en place pour fournir une aide financière rapide aux victimes de violences conjugales.

La loi, initialement composée de trois articles, a été étoffée grâce à des amendements parlementaires et gouvernementaux pour atteindre plusieurs articles phares. J'aborde en première partie le mécanisme créé pour soutenir financièrement les victimes de violences conjugales.

Un lien étroit entre violence conjugale et violence économique

Le rapport sénatorial de Jocelyne Guidez révèle une augmentation inquiétante des violences conjugales en France, avec une hausse des homicides et des plaintes pour violences conjugales. En outre, il a été rapporté que 19 % des femmes ont été victimes de violences économiques en 2020. Ces formes de violence ont pour effet de priver la victime de son indépendance financière, entravant ainsi sa capacité à mettre fin à la relation abusive avec son partenaire.

De quoi est faite cette nouvelle aide d'urgence pour les victimes de violences ?

La loi proposée vise à créer une aide d'urgence pour les victimes de violences conjugales, sous forme de don ou de prêt, financée par l'État et remboursée par l'auteur condamné le cas échéant. Cette aide est basée sur les principes de souplesse, rapidité et universalité, sans conditions de ressources. La loi prévoit un accompagnement adapté aux besoins de la victime, qui va au-delà de l'aide financière d'urgence et s'inscrit dans le dispositif expérimental Pack nouveau départ.

Une loi qui complète un pack en cours de déploiement dit de « nouveau départ »

Il s'agit d'un dispositif mis en place pour coordonner l'aide aux victimes de violence conjugale et faciliter l'accès aux aides existantes.

L'objectif est de fournir une réponse rapide, coordonnée et personnalisée tout en aidant à mettre en place une séparation rapide en cas de conjoint violent. Ce dispositif englobe l'allocation, l'accès prioritaire à la garde des enfants, l'insertion professionnelle, l'hébergement d'urgence et l'accompagnement psychologique. Il vise à améliorer la détection des victimes grâce à un réseau d'acteurs formés, ainsi qu'à faciliter l'accès aux aides et dispositifs de droit commun. L'aide financière d'urgence, créée par la loi du 28 février 2023, complète ce pack qui sera expérimenté dans différentes zones du territoire.

Conditions d'éligibilité à l'aide financière d'urgence pour les femmes battues

Pour être éligible à l'aide financière d'urgence, la victime doit avoir été victime de violences de la part de son conjoint actuel ou ancien, de son concubin ou de son partenaire enregistré en tant que partenaire civil. En outre, elle doit fournir l'un des trois documents suivants : une ordonnance de protection, un récépissé de dépôt de plainte ou un signalement adressé au procureur de la République.

Ci dessous les particularités à connaître concernant chaque pièce à fournir :

  • L'ordonnance de protection, délivrée par le juge aux affaires familiales, atteste de la vraisemblance des faits de violence allégués et du danger encouru par la victime ou les enfants du couple.
  • Le dépôt de plainte, effectué auprès d'un service de police ou de gendarmerie, relève de la compétence du procureur de la République.
  • Le signalement au procureur de la République, effectué par un tiers, informe le parquet de la situation subie par une personne vulnérable.

Le Sénat a également adopté dans cette loi un amendement qui permet aux victimes de violences conjugales de protéger leur adresse en choisissant de résider dans un centre communal ou intercommunal d'action sociale ou dans un organisme agréé. Cela leur évite de devoir écrire leur adresse dans les documents administratifs.

Sous quelle forme l'aide financière d'urgence est-elle proposée ?

L'aide financière d'urgence pour les victimes de violences conjugales peut être un prêt sans intérêt ou une aide non remboursable, dépendant de la situation financière et sociale de la victime et de la présence d'enfants à charge.

Un amendement du gouvernement a permis que l'aide d'urgence puisse être donnée sous forme de don. La situation précaire de la victime déterminera la forme d'aide qu'elle choisira. Si l'auteur de l'infraction est en mesure de rembourser le prêt, une option de prêt sans intérêt à sa charge peut être préférée.

Le montant de l'aide dépend de l'évaluation des besoins de la personne. Elle doit être versée dans un délai de trois à cinq jours. La victime peut bénéficier de droits et d'une assistance pendant les six mois qui suivent le premier versement. Les conditions d'application du dispositif seront déterminées par un décret.

Instauration d'une obligation d'information pour les victimes de violences conjugales

L'obligation d'information porte sur l'existence de l'aide financière d'urgence. Les victimes doivent être informées lors du dépôt de plainte ou du signalement et peuvent transmettre un formulaire simplifié de demande d'aide financière à l'organisme compétent.

Le dépôt de plainte est un moment difficile pour la victime. Deux dispositifs existent pour l'aider : le dispositif électronique mobile anti-rapprochement et la possibilité d'être accompagnée par un avocat à tous les stades de l'enquête.
Le texte indique que les différentes manières pour la fictime de transmettre le formulaire d'aide financière d'urgence à la caisse d'allocations familiales compétente devront être définies par un décret, dans le but de faciliter ses démarches.

Dans une société au sein de laquelle même de nos jours les commissariats peinent à former leurs équipes à une meilleure prise en charge des plaintes, il est à espérer que l'information et la formation des agents soient considérablement améliorés à court terme.

L'organisme responsable du versement de l'aide financière d'urgence :

Le Code de l'action sociale et des familles, article L. 214-11, stipule que les organismes de prestations familiales (ODPF) fournissent et contrôlent l'aide financière d'urgence aux victimes de violences domestiques pour le compte de l'État.

Cette aide était à l'origine fournie par la Caisse nationale des allocations familiales, mais un amendement à la loi du gouvernement a transféré cette responsabilité à l'État. Les ODPF comprennent également les fonds de la Mutualité Sociale Agricole (MSA), dont le remboursement intégral est garanti par l'État.

Une innovation qui peut faire reculer certains conjoints violents : le remboursement de l'aide financière d'urgence à la charge de l'auteur des violences

L'article 4 de la nouvelle loi ajoute deux nouveaux articles au code pénal et au code de procédure pénale. Dans le nouvel article 222-441 du code pénal, l'auteur de violences domestiques est tenu de rembourser le prêt contracté par la victime jusqu'à un certain plafond. Cette peine devient obligatoire dans certains cas de condamnation.

Le tribunal peut décider de ne pas imposer cette peine dans certaines circonstances. Selon le nouvel article 15-3-3 du code de procédure pénale, les forces de l'ordre doivent informer les victimes de violence domestique de leur droit à recevoir une aide financière d'urgence. L'article 4 quant à lui modifie les articles 41-1 et 41-2 du code de procédure pénale et donne au procureur de la République la possibilité de mettre fin aux poursuites en demandant le remboursement des prêts à l'auteur des violences ou en proposant une composition pénale incluant le remboursement des prêts.

En quoi consisteront les mesures de suivi du dispositif d'aide financière d'urgence ?

Deux rapports d'évaluation sont prévus pour assurer le suivi du dispositif d'aide financière d'urgence.

  • Il faudra établir un état des lieux de la procédure de transmission et d'enregistrement des demandes.

Conformément à l'article 5 de la loi, le gouvernement doit remettre au Parlement un rapport sur le système d'enregistrement et de transmission des demandes d'aide financière d'urgence aux victimes de violences conjugales dans les commissariats de police et les unités de gendarmerie.
Ce rapport a pour objet d'évaluer le dispositif d'aide financière d'urgence en examinant notamment le nombre de demandes transmises au titre de l'aide d'urgence, la nature et la recevabilité des demandes, ainsi que l'intervention des travailleurs sociaux.

  • La loi stipule également une exigence concernant une étude sur l'extention à l'outre mer

Dans l'article 6 de la loi, le gouvernement doit présenter un rapport au Parlement sur la possibilité d'étendre l'aide financière prévue par cette loi aux victimes de violences conjugales en Nouvelle-Calédonie ou dans les territoires d'outre-mer.

Ce rapport devra examiner si les résidents de ces collectivités peuvent bénéficier des droits accordés par la loi tout en tenant compte des compétences dévolues. Les collectivités d'outre-mer ont des caractéristiques propres, liées aux bassins de vie qu'elles couvrent et à leur autonomie législative. Le taux de pauvreté est 12 fois supérieur à celui de la France. Les taux de précarité et de violence y sont plus élevés chez les victimes de violences conjugales. Il est donc important d'adapter le système d'aide financière d'urgence à ces réalités, par une adaptation spécifique de l'aide financière d'urgence à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte

Une adaptation spécifique de l'aide financière d'urgence à Saint-Pierre-et-Miquelon et Mayotte

L'article 2 II de la loi du 28 février 2023 autorise le gouvernement à adapter, par voie d'ordonnance, les mesures d'aide financière d'urgence à Saint-Pierre-et-Miquelon et au département de Mayotte en raison de leurs cadres institutionnels particuliers.

Saint-Pierre-et-Miquelon, bien que relevant de l'article 74 de la Constitution, applique le principe d'identité législative grâce à sa loi organique n° 2007-223 du 21 février 2007. Mayotte, quant à elle, nécessite un déploiement normatif progressif en raison de son statut de département. Ainsi, le législateur a expressément autorisé le gouvernement à adapter ces mesures pour ces deux collectivités.

Les situations varient entre les départements de France, mais les problèmes sont les mêmes un peu partout. Félicitons nous toutefois de n'être pas dans une situation comparable à certains pays, quand l'on fait un état des lieux de la violence conjugale dans le monde.

Quelle est la date d'entrée en vigueur de l'aide financière d'urgence ?

L'article 7 de la loi stipule que l'aide financière d'urgence à la victime de violences conjugales entrera en vigueur à une date fixée par décret, au plus tard neuf mois après sa promulgation. L'Assemblée nationale a inséré cet article pour différer l'application de la loi et la suspendre à une disposition réglementaire.

Un sous-amendement législatif a fixé le délai maximal à neuf mois, soit le 1er décembre 2023 en l'espèce. Il est peu probable qu'aucun décret ne paraisse d'ici cette date, compte tenu de l'urgence à mettre en œuvre ce dispositif d'aide financière pour les victimes de violences conjugales.

Quelles sont les autres aides déjà disponibles pour les femmes victimes de violences conjugales ?

L'aide globale a nettement évolué ces dernières années, mais une partie des solutions proposées par les pouvoirs publics reste méconnue. En tant qu'avocate établie sur Paris et luttant avec succès pour mes clientes contre les violences conjugales depuis plus de 30 ans, j'ai désiré terminer cet article en vous les listant. Vous pouvez vous passer d'une avocate pour certaines d'entre elles, bien que son soutien puisse être d'un grand secours dans une situation de violence conjugale.

Le téléphone grave danger (TGD) :

Dispositif d'alerte permettant aux femmes en situation de danger imminent de contacter rapidement les forces de l'ordre en cas de menace de leur agresseur. Pour obtenir un TGD, contactez votre travailleur social, association locale d'aide aux victimes ou les forces de l'ordre. Le juge peut également décider de l'attribuer. En cas de danger, il permet d'appuyer sur le bouton d'alerte pour être mise en relation avec un centre d'écoute 24h/24.

L'hébergement d'urgence :

Mise à disposition de places en centres d'hébergement spécialisés et sécurisés pour les femmes victimes et leurs enfants, afin de les protéger de leur agresseur. Contactez le 115 (numéro d'urgence sociale) ou une association locale pour être orientée vers un centre d'hébergement. Des structures spécifiques existent, comme le réseau Solidarité Femmes.

Un accompagnement psychologique et social :

Accès à un suivi psychologique et social gratuit par des professionnels pour aider les victimes à surmonter les traumatismes et à se reconstruire. Renseignez-vous auprès de votre mairie, centre médico-social ou association d'aide aux victimes pour connaître les dispositifs d'accompagnement disponibles dans votre région.

L'aide juridictionnelle :

Prise en charge partielle ou totale des frais liés à la procédure juridique (avocat, expert, etc.) pour les femmes victimes ayant des ressources insuffisantes. Remplissez le formulaire Cerfa n°15626*01 disponible en ligne ou auprès d'un tribunal et déposez-le avec les pièces justificatives au tribunal compétent. Le bureau d'aide juridictionnelle étudiera votre demande.

L'ordonnance de protection :

Mesure d'urgence prise par un juge aux affaires familiales pour protéger les victimes de violences conjugales, incluant notamment l'éloignement de l'agresseur, l'attribution du logement familial à la victime, et des mesures concernant la garde des enfants. Saisissez le juge aux affaires familiales (JAF) du tribunal compétent en remplissant le formulaire Cerfa n°16468*01 et en fournissant les preuves des violences. Un avocat n'est pas obligatoire, mais peut être utile.

Le système de plainte en ligne :

Permet aux femmes victimes de violences conjugales de déposer une plainte à distance, sans se rendre au commissariat, facilitant ainsi les démarches. Déposez une pré-plainte sur le site www.pre-plainte-en-ligne.gouv.fr. Un agent de l'État se chargera de vous donner un rendez vous au commissariat par exemple pour une finalisation rapide de votre plainte.

Les référents violences conjugales :

Agents de police ou de gendarmerie formés spécifiquement pour accompagner et soutenir les victimes de violences conjugales tout au long de la procédure. Adressez-vous à un commissariat ou une gendarmerie pour être mise en relation avec un référent. Il vous accompagnera dans vos démarches et assurera le suivi de votre affaire.

Le dispositif de suivi et de contrôle des auteurs de violences conjugales :

Mesures visant à surveiller et contrôler les agresseurs, par exemple avec un bracelet électronique, pour prévenir les récidives et protéger les victimes. La mise en place de ce dispositif relève de la décision d'un juge. Discutez-en avec votre avocat ou les forces de l'ordre pour connaître les modalités.

Un accès prioritaire aux dispositifs d'aide au logement :

Permet aux femmes victimes de violences conjugales de bénéficier d'une priorité d'accès aux logements sociaux et aux aides au logement, afin de faciliter leur relogement et leur indépendance. Contactez une assistante sociale, votre mairie ou une association d'aide aux victimes pour constituer un dossier de demande de logement social. La priorité sera accordée selon la situation de la victime et les critères spécifiques à chaque département.

Entre le pack d'aide d'urgence et ces différents soutiens, il sera désormais possible, avec l'aide toujours recommandée d'un bon avocat pour victime de violence de couple, d'obtenir une mise sous protection plus efficace de la femme victime de violence conjugale, et selon la phrase consacrée, "ce n'est pas trop tôt" !

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